17h57
C’est en écoutant l’émission de Ruquier sur Europe 1 ce soir, que l’idée de ce billet s’est formée… une idée construite sur une certaine exaspération qui me prend chaque vendredi en écoutant Yann Moix se pavaner, se délecter de ses propres mots face à l’équipe de Ruquier (à quelques rares exceptions près) en totale admiration ! Et moi, à chaque fois, je m’énerve ! Et quand je m’énerve, j’ai besoin d’en parler.
Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, mais depuis quelques temps, à la télé (Entrée Libre sur France 5) et à la Radio (cf. plus haut), les écrivains ne viennent plus pour parler de leur propre livre mais pour parler des livres des autres, ils deviennent des critiques littéraires. Cela n’est pas vraiment nouveau, j’en conviens, mais le phénomène semble se répandre. Certes Balzac écrivit sur Stendhal, Sand sur Dumas père et fils et j’en passe. Certes un auteur est censé lire beaucoup, mais ce qui m’ennuie c’est que dans cet exercice nouveau car médiatique et destiné à la masse (terme employé en communication et qui n’a rien de péjoratif), j’ai plus l’impression que ces auteurs font un numéro durant leur critique et c’est d’autant plus vrai avec mon nouveau copain Yann Moix. Pour avoir surtout entendu les critiques de Yann Moix, je centrerai mes remarques sur ce dernier, assez représentatif de ce qui m’horripile dans ce nouvel exercice médiatique.
Il faut prendre en compte le contexte de l’émission de Ruquier. La bande à Ruquier, comme on dit, est composée de personnes venant de plusieurs horizons : des humoristes (pour une grande part), un ancien de Loft Story, des actrices et j’en passe. Le maître mot est « Rire » et « bonne humeur » comme l’explique l’intitulé de l’émission sur le site d’Europe 1, ne pas se prendre au sérieux et le manque de culture est plus vue comme un atout que comme un handicap, pour la première raison qu’il fait rire : Steevy Boulay par exemple est souvent raillé pour ses bourdes et ses lacunes, tout comme Gérard Miller est le chiant de la bande, car perçu comme intello. La culture est donc souvent quelque peu dénigrée, car, il faut bien le dire, il ne faut pas faire intello, et la culture les emmerde, pour être poli, du moins pour la majorité. Disons que l’absence de culture est revendiquée, et certains chroniqueurs comme Bénichou, Sarraute ou encore Gérard Miller se désespèrent souvent en constatant l’ignorance crasse des autres.
Le vendredi soir est le jour de la critique d’un livre. Généralement trois personnes lisent le même livre et donnent leur avis. Depuis la rentrée de septembre Yann Moix intervient donc ce jour-là. Isabelle Motrot participe aussi à ce rendez-vous du vendredi. Le troisième larron quant à lui est changeant : Christine Bravo, Caroline Diamant ou, comme ce soir Bigard, qui a eu cette phrase culte : « je préfère lire des livres utiles » (????). Ce trio est cependant assez intelligemment constitué car il réunit : un auteur, une journaliste littéraire et un lecteur naïf.
Bref. Si j’apprécie souvent la critique d’Isabelle Motrot (même quand je ne suis pas de son avis), celle de Yann Moix, vous l’aurez compris, m’insupporte. Alors pourquoi ?
Dans le contexte que j’ai décrit plus haut, j’ai oublié de signaler que souvent, les chroniqueurs ne sont pas tendres, et que la vanne vacharde est de mise (ou « joutes verbales »). Yann Moix respecte alors cet impératif ! oh la la comme il est méchant Yann Moix avec ses pairs !!! et qu’est-ce qu’on se marre… ainsi Martinez est nulle et n’a rien compris aux emmurées, elle donne un prénom importable à son héroïne, les romans sont dits « médiocres », « nuls », « mal écrits » et j’en passe. Une fois cela dit, Yann Moix lit de longs extraits à toute vitesse pour appuyer ses dires. En gros tout est nul ou presque, d’après Yann Moix.
Et là vous allez me dire : mais de quoi se plaint-elle puisqu’elle aime les critiques négatives ? Si je me plains ou plutôt m’énerve, c’est que Yann Moix tombe précisément dans le piège. Il fanfaronne, fait de bons mots, est vachard à souhait, et comme au royaume des aveugles les borgnes sont rois, tout le monde applaudit ! Bref c’est tout sauf une critique négative constructrive ! c’est méchant, souvent de mauvaise foi et très très énervant, mais peut-être est-ce le but ! Et surtout c’est contre-productif, car trop excessif. Alors oui, face à des personnes qui lisent un livre par an, voire un peu plus, il peut faire illusion, et puis, vous comprenez c’est un auteur donc il sait de quoi il parle. Mais descendre un auteur ou un livre en flèche, tout le monde peut le faire, accumuler les adjectifs hyperboliques (positifs comme négatifs) ce n’est pas bien difficile… manque le fond. Quand on me dit : « c’est nul », on ne m’a rien dit. Etre auteur ne justifie pas tout, et un peu de tempérance, un peu moins de vanité seraient les bienvenues. Peut-être que pour être un bon critique, il faut déjà être un bon auteur, car comme le disait Philippe Destouches : « la critique est aisée, mais l’art est difficile » !
Je vous conseille de lire le cours très intéressant que j’ai déniché en faisant quelques recherches, et qui fait le point sur les différentes sortes de critiques littéraires!)