Dimanche 9 Septembre 2012 – 8h58

Hier soir, j’ai donc commencé ma lecture de La Dame du manoir de Wildfell Hall d’Anne Brontë (Editions Archipoche). Comme je le signalais dans mon billet d’hier, je possède ce roman depuis plus de trois ans dans une autre édition (Phébus), au titre différent : La Recluse de Wildfell Hall. J’avais déjà parlé en son temps de ces changements de titres selon les éditions. Le tire original du roman est : The Tenant of Wildfell Hall. Or « the tenant » signifie exactement « la locataire ».

En commençant la lecture du roman dans l’édition poche, j’ai été un peu surprise de l’entrée en matière : « Remontons, si tu le veux bien, à l’automne 1827. » (p.15), et la fin du chapitre m’a laissé penser qu’il y avait un petit souci : « Ton fidèle Gilbert Markham ». Il s’agissait donc d’une lettre dont, visiblement il manquait le début. Je suis donc allé déterrer mon exemplaire Phébus, et j’ai beaucoup mieux compris.

En effet dans l’édition Phébus, non seulement figure une préface écrite par Anne Brontë, sous son pseudonyme Acton Bell, et datant du 22 juillet 1848, mais on peut y lire également le début de la lettre qui explique la confession de Gilbert à son ami J. Halford. Il semblerait donc que les deux éditions ne s’appuient pas sur le même texte originel.

Poursuivant mes recherches, et cherchant à comprendre cette différence, j’ai lu la note de l’éditeur chez Phébus. Et voilà ce que j’ai lu :

En 1854 paraît chez Thomas Hogson une nouvelle édition bon marché de La Recluse, version malheureusement lourdement expurgée – et expurgée bien sûr de ses éléments les plus scandaleux. Il n’existe plus aucune trace du manuscrit original d’Anne Brontë, et c’est cette édition qui deviendra, jusqu’à une date récente, la base de toutes les éditions anglaises, et partant, des traductions.

La version que nous vous présentons ici, publiée en France en 1947 sous le titre La Recluse de Haworth, a donc été complètès des éléments manquants à partir de la version « originale » de 1848. [pp.7/8]

Au contraire, dans l’édition Archipoche, aucune indication sur le choix du texte de base, mais tout laisse penser que l’éditeur se soit appuyé sur la réédition de 1854, et non sur celle de 1848. A cette découverte, j’ai donc décidé de me fier à l’édition Phébus, que je trouve donc plus fidèle au texte de l’auteur. J’ai également été décidée par une mise en comparaison des traductions, comparaison qui m’a permis de voir les différences, certes minimes mais…

Cette petite mésaventure reste cependant intéressante, car elle prouve à quel point un éditeur d’œuvres en langue étrangère (donc nécessitant une traduction) et anciennes doit veiller à choisir une version la plus proche possible de l’originale, et doit aussi se méfier des remaniements qui ont pu peser sur cette version à une époque où certains sujets étaient quelque peu shocking et revue pour la bienséance.

Il est effectivement tout à fait louable aux éditions Archipoche de rendre accessible dans ce format, des romans qui sont souvent difficiles à trouver, mais c’est quand même bien dommage de ne pas respecter davantage le texte de l’auteur.

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30 réflexions au sujet de « Dimanche 9 Septembre 2012 – 8h58 »

  1. C’est un avantage dans ce cas de pouvoir lire en VO, mais il faut du coup tout de même faire attention à l’édition aussi en VO selon si elle reprend le texte original de départ, ou celui modifié pour la bienséance de l’époque! Bonne lecture Anne-Claire, avec Phébus du coup?

  2. C’est dingue ce genre de truc!!! Pour une lectrice moins bien avisée, c’est à te « dégoûter » de lire des classiques. Où va-t-on s’il manque une partie du texte alors? ;-)… Heureusement que tu avais cette autre édition dis donc…

  3. J’avais eu le même problème avec « Les mystères d’Udolphe » d’Ann Radcliffe. J’avais commencé ma lecture dans une édition dont la traduction me semblait très mauvaise. En passant à l’édition Folio, j’ai mieux apprécié le texte, notamment grâce aux notes et à la préface.

  4. Archipoche fait souvent des réeditions de textes intéressants mais sur des traductions tombées dans le domaine public, donc faites au XIXe siècle. Ce doit être le cas de celui-ci !
    En passant, j’aime beaucoup lire tes aventures quotidiennes de lectrice, merci de partager cela avec nous 🙂

  5. comme l’édition Phébus est introuvable, je devrais me rabattre sur cette édition de poche, mais tes réflexions de lectrice/enquêtrice sont très intéressantes, merci de les partager avec nous. Comme Eliza, j’aime aussi beaucoup te lire ici, ce journal de lecture est très intéressant, si j’étais aussi érudite que toi, j’en ferais sûrement un moi aussi, mais pour l’instant je me contente de mon blog 🙂

    • OUI toujours !
      La pauvre Anne a toujours été écrasée par les frangines, souhaitons que la sortie en poche chez Archipoche donne envie à Phébus de le ressortir chez Librretto, ce serait quand même dommage de n’avoir qu’une édition tronquée en français. Et si je leur faisais un petit mail 😉 !

  6. la soeur Brontë expurgée ! elle devait en dire des choses scandaleuses ! j’espère que mon Dickens en Archipoche n’est pas victime de ce genre de censure…ça vaut le coup d’avoir des livres en doublon finalement !

  7. Il y a de plus en plus de différence, on avait fait la remarque avec les « modernisation » des club des cinq… c’est dommage tout de même de ne pas laisser ces beaux textes entiers…

  8. C’est franchement dommage et regrettable, d’autant plus que la compréhension du texte du coup est totalement faussée… C’est du non-respect de l’auteur ni plus ni moins…
    A part ça bonne lecture :0)

  9. C’est toujours intéressant de connaître les histoires des traductions et des éditions successives, de voir les (re)découvertes de versions originelles, dans certains cas, et la façon dont les textes sont malmenés selon le goût de l’époque dans d’autres. Ca m’incite, moi aussi, à lire en version originale quand c’est possible.
    Contente que tu aies trouvé un livre susceptible de te charmer. dommage qu’il faille souvent se tourner vers les classiques pour ça.

  10. Ping : Quoi de neuf dans le monde des livres ? #2 « Le Blog des Livres qui Rêvent …

      • Oui c’est déjà bien, j’étais d’ailleurs ravie de tomber dessus en librairie.
        Mais bon, dommage cette histoire de version… Quand on se pose la question, c’est finalement difficile de choisir quelle édition prendre pour des classiques anglais traduits… j’ai ce problème pour les livres de Jane Austen, je ne sais quelle édition privilégier…

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